Les hérauts de la Résistance catholique. Quatre-vingts ans après la Lettre de Mgr Saliège

Marcel Lugassy Enguerrand Serrurier
Histoire - Recenseur : Bernard Joassart s.j.

16 et 17 juillet 1942 : rafle du Vel’d’Hiv. Du côté de la hiérarchie catholique – pourtant majoritairement pétainiste, avec certes des nuances –, le 23 août suivant, l’archevêque de Toulouse, Jules Géraud Saliège, rédige une lettre pastorale Et clamor Jerusalem ascendit, dans le style inimitable qui est le sien et qui traduit son tempérament ne s’embarrassant pas de circonlocutions diplomatiques : on en connaît le contenu qui est une dénonciation sans appel de la politique anti-juive de Vichy. Ce texte sera suivi par d’autres documents pastoraux, qui n’adoptent certes pas tous le même ton, de la part de collègues de Saliège : celui de Pierre-Marie Théas, évêque de Montauban (26 août), tout aussi rude que celui de Saliège (ce prélat sera en outre arrêté) ; ceux du cardinal Gerlier, archevêque de Lyon, et de Jean Delay, évêque de Marseille (toutes deux du 6 septembre) ; ceux de Jean-Joseph Moussaron, archevêque d’Albi, et de Edmond Vansteenberghe, évêque de Bayonne (les deux datant du 20 septembre).

Conçu dans le cadre du 80e anniversaire de la déclaration de Saliège, cet ouvrage rassemble plusieurs contributions qui, à la fois, présentent le contexte et permettent de rencontrer nombre de personnalités qui, à leur manière, ont contribué non seulement à ce que certains évêques s’élèvent contre la barbarie nazie mais aussi organisent le sauvetage des Juifs. Les unes sont bien connues, en particulier Mgr Bruno de Solages, recteur de l’Institut catholique de Toulouse, proche de son évêque, les autres sans doute moins : René de Saunois, bon connaisseur de l’Allemagne du temps, cousin de Solages, la religieuse Denise Bergon, le jésuite Roger Braun, Marie-Rose Gineste, proche de Mgr Théas, Aimé-Georges Martimort, alors bibliothécaire de l’Institut catholique de Toulouse, le général de Castelnau, et bien d’autres encore. Et il ne faudrait pas oublier qu’il y eut d’autres formes de résistance active, sans doute sous une forme plus « intellectuelle », tels les Cahiers du témoignage chrétien, qui éclairèrent les consciences sur le mal radical qu’était le nazisme.

On ne peut qu’inviter le lecteur à prendre connaissance de l’ouvrage. Peut-être devrait-il commencer par la lecture des textes de protestations évoqués plus haut, d’ailleurs précédés par la lettre du pasteur Marc Boegner adressée à Pétain le 20 août 1942. Il me paraît également important d’attirer l’attention du lecteur sur la contribution de Jacques Sémelin. D’une manière qui en surprendra sans doute plus d’un, il souligne que, à propos de tout ce qui touche à la Shoah en France, « les catholiques sont atteints du “syndrome du profil bas” » (p. 379) et ont une propension exagérée à se cantonner dans une sorte d’autoflagellation, dont certains actes de repentance leur brouillent la mémoire : pour l’A., même si les réactions épiscopales furent peu nombreuses, il est incontestable que les interventions de Saliège et autres eurent un impact bien réel, et mobilisèrent nombre de personnes dans le sauvetage des Juifs. — Bernard Joassart

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