Éduquer la conscience dès l’enfance. S’entraîner, se relever, grandir dans le bien

Gabrielle Vialla
Morale et droit - Recenseur : Alain Mattheeuws s.j.

Voici un livre éclairant sur une réalité à la fois vitale et complexe de l’être humain. La conscience morale appartient à l’identité de la personne, mais, en même temps, elle doit être éduquée, formée. « Elle n’est donc pas conçue “prête à l’emploi” » (p. 29). Elle intervient dans toutes les décisions humaines et son jugement est lié à la dignité de l’homme et à son intériorité : « toute personne accède au bien, non par l’injonction extérieure, mais bien d’abord depuis l’intérieur d’elle-même » (p. 33). Si la conscience est le propre de l’homme, ce dernier peut s’en servir de manière relationnelle ou égoïste (voir, en annexe, les tableaux récapitulatifs, p. 218). La conscience est certes le lieu d’un combat spirituel et de l’exercice de la liberté.

La richesse de cette réflexion se manifeste dans l’importance accordée à la formation de la conscience (1) et dans la mise en évidence des difficultés rencontrées par celle-ci (2).

Gabrielle Vialla (1), épouse et mère de famille, nous décrit cette formation au fil de la croissance du tout petit enfant, de l’enfant, de l’adolescent, de l’âge adulte et de la vieillesse. Retenons de ce long processus des repères « dans l’imitation, la maîtrise de soi, l’éducation à la chasteté et à l’intimité du cœur, l’exemplarité de toute autorité, la fidélité en amour, le goût de transmettre la vie, les paroles de sagesse ». La conscience personnelle grandit avec l’homme et s’enrichit des expériences partagées. La mission des parents est décisive dans sa structuration auprès des enfants. Elle est aussi en lien immédiat avec le Créateur : la conscience est le lieu où sont inscrites les traductions de la loi divine et leurs interprétations. Dieu est présent au sein de ce sanctuaire. Prendre conscience de cette présence permet à tout homme d’accéder à sa dignité et à sa véritable identité. Cette longue réflexion est un beau commentaire du CEC 1784 qui insiste sur le fait que « l’éducation de la conscience est une tâche de toute la vie ». Cette éducation est un enjeu fondamental, car chaque personne est appelée en divers moments de sa vie à poser un « jugement moral » sur des actes importants à éviter, et d’autres qui discernent le bien et qui le font. La conscience morale personnelle est une instance incontournable pour agir bien et selon le plan de Dieu.

La 2e partie du livre est consacrée aux difficultés qu’affronte la conscience dans la vie d’un homme. Elles surgissent de l’intérieur lorsque celle-ci s’endurcit ou lorsque son champ de réflexion se rétrécit ou se centre obstinément sur elle-même en coupant le lien relationnel avec les autres et le monde. Des souffrances psychologiques et affectives peuvent aussi affecter le jugement : ce dernier peut s’altérer, s’aveugler, devenir erroné. Si la conscience se replie sur elle-même et n’intègre plus ce qu’elle vit, elle devient indifférence ou elle sombre dans l’indignation permanente.

D’autres dangers extérieurs menacent également l’exercice de la conscience : la destruction de la famille et de la vie, les changements indus du sens des mots, le contrôle des consciences par des autorités ou des systèmes extérieurs, l’individualisme qui ne partage plus la sagesse d’un peuple ou d’une tradition, certaines options éducatives et culturelles. Le phénomène de la « marionnette » doit être bien assumé : toute autorité est soumise à une autre plus grande qu’elle ; lors d’un abus d’autorité, « on peut résister, se soustraire ou ruser. Mais elle peut aussi répercuter un abus en devenant une marionnette (p. 188) ». L’effet marionnette endort la conscience qui amplifie alors l’abus de pouvoir ressenti. La conscience ne doit pas oublier d’être responsable d’elle-même ! Ces réflexions sont réalistes et mettent les lecteurs en responsabilité. Pour les chrétiens, la conscience doit aussi se situer face au Magistère, dans l’Église telle qu’elle est, dans la réception de l’Écriture et de la Tradition. Ce n’est pas toujours facile, mais les intuitions de l’A. sont stimulantes !

La conscience appartient au sujet. Elle est un lieu de vie. Elle permet d’exercer un discernement moral et de chercher le vrai et le bien. Réfléchir sur l’existence de la conscience humaine, ce n’est pas entrer dans un labyrinthe obscur, mais découvrir la beauté de la lumière qui nous habite et nous permet de rendre gloire à Dieu. Un livre à lire et à vivre. — Alain Mattheeuws s.j.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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